jeudi 23 février 2012

En Inde, les journalistes citoyens font le show


En Inde, l’engouement pour le journalisme citoyen est tel que des chaînes de télévisions ont crée des émissions spéciales dédiées à ce nouveau genre de pratique journalistique. « Speak Out India » est une émission de télévision unique en son genre. On y découvre les péripéties d’indiens issus de communautés isolées, qui utilisent le journalisme pour couvrir des sujets percutants, comme les conflits ethniques, la corruption gouvernementale, ou encore la pauvreté. Décryptage d’une émission dans laquelle les journalistes citoyens font le show. 

 
« Speak Out India »  c’est l’histoire de citoyens ordinaires, comme vous et moi. Pourtant, eux ont décidé de contribuer activement à la collectivité indienne, en rapportant ce qui se passe dans les quatre coins de l’Inde. A travers leurs histoires, ces apprentis journalistes entendent transmettre l’information du point de vue des populations locales. Une manière unique de traiter l’actualité au cœur des plus petits villages indiens.

Si plusieurs chaînes de télévisions indiennes proposent des programmes basés sur le journalisme citoyen, « Speak Out India » est la première émission dans laquelle la totalité du contenu est produite uniquement par les communautés. Par conséquent, en plus de donner une voix à ces citoyens isolés, la chaîne en fait les producteurs et acteurs principaux du média. Ranjana Jetley, directrice des programmes chez NewsX's, se dit « ravie d'être en mesure d'offrir une plate-forme pour ces voix uniques de se faire entendre ».  

Si les communautés indiennes ont plutôt l’habitude qu’on parle pour eux, « Speak Out India » sollicite les journalistes citoyens indépendants pour qu’ils expriment eux-mêmes leurs points de vue sur les problèmes qui les touchent directement. La corruption, la pauvreté, les atteintes aux droits de l’homme, ou encore les conflits ethniques, politiques et religieux sont tant de sujets traités à travers les témoignages de ces correspondants locaux. Une émission d’une demie-heure chaque semaine, ayant pour ambition de présenter un éventail de reportages riches et uniques sur les communautés de toute l’Inde.

Les correspondants de « Speak Out India » ont été formés pendant des mois aux pratiques et éthiques du journalisme par l’ONG « Video Volunteers ». Issus de 24 Etats de l’Inde, les participants sont recrutés en fonction de leur sexe, leur age, leur langue ou encore leur religion. Un panel de citoyens d’horizons très disparates, visant à produire un show authentique.  L’objectif de l’ONG est désormais d'étendre son réseau de correspondants, de 30 à 626, chiffre relatif à chaque district, permettant ainsi à toutes les communautés indiennes de faire entendre leurs voix dans les grands médias.


Retrouvez ci-dessous le premier épisode de l’émission « Speak Out India »

 

lundi 20 février 2012

Entretient avec Jérôme Boulle, rédacteur en chef de lexpress.mu


Jérôme Boulle pourrait être comparé à un vieux sage du journalisme. A la veille de sa retraite, ce journaliste a fait le tour du monde et connaît le métier sur le bout des doigts. Avant d’être directeur de l’édition électronique de lexpress.mu, le premier quotidien de l’île Maurice, il a été rédacteur en chef à l’express de Madagascar.  Diplômé de l’université de la Réunion et de Paris Dauphine, Jerôme Boulle a aussi eu une carrière politique de 20 ans au sein du MMM, un parti d’opposition mauricien. Il a accepté de répondre à mes questions sur le journalisme mauricien et ses spécificités.

Comment expliquez-vous que la plupart des journalistes mauriciens n’aient pas fait d’études ?

Il n’y a pas de formations en journalisme à Maurice. Celle donnée à l’Université de Maurice n’est pas adéquate, elle ne pas forme convenablement les jeunes à devenir journaliste. D’autre part, les journalistes sont très mal payés. Donc ceux qui font des études de journalisme à l’étranger ne reviennent pas exercer à Maurice. En début de carrière, les journalistes sont rémunérés 15 000 roupies (environ 400€). D’autre part, il n’y a pas beaucoup de perspectives d’avenir. C’est un petit pays, et il faut attendre longtemps avant d’atteindre un poste a responsabilité. Le salaire est lié à la promotion, donc beaucoup de jeunes choisissent de ne pas s’investir dans une formation en journalisme.

Qu’est-ce qui caractérise le journalisme mauricien aujourd’hui ?

Le journalisme mauricien est dans une phase transitoire, dans le sens ou il y a une mutation dans les sociétés de presse. Dans le temps, les journalistes étaient des élites mauriciennes. Maintenant, ce qui caractérise le journalisme mauricien c’est la jeunesse des journalistes. La moyenne d’âge est inférieure à 30 ans. On a un corps journalistique jeune, avec ses qualités et ses défauts. Fougueux, passionné, mais aussi inexpérimenté et qui manque de contacts. Les jeunes journalistes mauriciens sont foncièrement honnêtes.

Les Mauriciens s’informent-ils davantage sur Internet ou avec la presse écrite ?

La presse papier devance toujours le web à Maurice. Les personnes continuent à acheter leur journal papier, ils y sont très attachés. Le web existe dans un milieu social spécifique, le peuple ne va pas lire le web car toutes les familles n’ont pas un ordinateur à la maison avec Internet. En revanche, pour l’actualité quotidienne, le mauricien se repose surtout sur les radios. Mais le journal reste la tradition pour authentifier ce qui est dit ailleurs. La personne écoute la radio, mais elle va croire l’information uniquement quand elle la lira noir sur blanc, si bien que les ventes des journaux n’ont pas connue cette chute irrémédiable qu’on a connue ailleurs.

Avez-vous quelques chiffres qui attestent du succès de lexpress.mu ?

En 2008, le nombre de visite par mois étaient 432 000 ; maintenant, c’est 887 000. La moyenne des visites par jour est passée de 14 000 à sa création en 2008 à 28 000 aujourd’hui. Lexpress.mu est placé au 8e rang des sites les plus visités à Maurice, mais c’est le premier site proprement mauricien. 49% des lecteurs sont mauriciens, et 51% vivent à l’étranger, comme en France, en Angleterre, ou au Canada, dans tous les pays où se trouve la diaspora mauricienne.

Selon vous, l’avenir du journalisme se trouve-t-il sur Internet ?

Ce n’est pas l’avenir du journalisme qui se trouve sur Internet, mais plutôt l’avenir du journalisme d’actualité. Il se trouvera ailleurs : sur Internet, à la télévision, la radio et sur les réseaux sociaux. Mais le journalisme papier en tant que tel continuera à exister, parce qu’en même temps que se développe ces supports audiovisuels, il y a pour l’écrit une demande plus poussée. Pour l’actualité, l’avenir est dans les écrans, pas seulement sur Internet. Car l’information devient globale et rapide, on n’a plus besoin d’attendre. Ça le papier ne pourra pas le satisfaire. En revanche le papier peut satisfaire le lecteur quand celui-ci cherche un dossier, une analyse, un reportage découverte ou thématique. En même qu’il y a cette migration vers de nouveaux supports, il y a un développement des magasines de qualité. Aucun support n’a jamais tué un autre support médiatique. Au contraire, il le pousse à s’adapter et à s’améliorer.

vendredi 10 février 2012

Madagascar : un centre de presse pour dynamiser les pratiques journalistiques


Source photo : www.snu.mg


Assurer la liberté de la presse et améliorer la qualité du travail journalistique sont des intérêts qui dépassent les frontières malgaches. L'île Rouge, comme on la surnomme, s’est dotée en juin 2011 d’un centre de presse Malagasy. Un espace où les journalistes pourront se rencontrer et se documenter afin d’améliorer les pratiques du secteur journalistique malgache.

Le « centre de presse Malagasy » est né le 30 juin 2011, dans la ville d’Antananarivo, la capitale économique et politique de Madagascar. Il deviendra bientôt une adresse incontournable pour les professionnels de l’information ainsi que les étudiants en journalisme malgaches. Documentations, archives et supports multimédias sont tant de services offerts gratuitement par le centre. Des formations, évènements, manifestations ou encore des ateliers seront également organisés régulièrement pour le plaisir des journalistes de la capitale. Une mise à disposition de moyens et de ressources pour améliorer la qualité du travail de recherche et les pratiques journalistiques à Madagascar.

Le projet a vu le jour grâce aux efforts coordonnés de WWF, l'Ambassade des Etats-Unis, l'Ambassade de France, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et la Banque Mondiale. Ces derniers ont déboursé pas moins de 100 000 US$ pour promouvoir le professionnalisme chez les journalistes malgaches. Les protagonistes de ce projet estiment que le développement durable de Madagascar ne peut être réalisable qu’avec des médias libres et professionnels. « Sans le pouvoir critique exercé par les journalistes, on ne peut pas avancer vers une véritable démocratie », explique Jean Marc Châtaigner, ambassadeur de France à Madagascar.

Ce centre représente une avancée considérable pour les journalistes malgaches, qui travaillent souvent dans des conditions difficiles. Les scissions au sein de la presse sont monnaie courante, car le manque d’information provoque des tensions et complique la résolution des défis se trouvant au cœur de la crise. Le centre permettra aux journalistes de se rencontrer, de dialoguer, et de trouver un moyen de bâtir les fondations d'une institution de presse solide et indépendante. Dans cette perspective, le centre Malagasy devrait devenir une entité indépendante au cours des prochaines années, jouissant ainsi d'une autonomie juridique et financière. Avec pour objectif final, une société libre et démocratique, dans laquelle l'accès à l'information serait des plus précises et ponctuelles.

Un centre de presse du même genre, situé dans la ville d’Antanimena, a enregistré 700 adhérents. Il a permit d'améliorer considérablement la diversité et la qualité des productions journalistiques locales et nationales. Le centre Malagasy espère connaître le même succès.


Sources : fr.allafrica.com & www.madonline.com

dimanche 5 février 2012

L'Océan Indien à l'heure du média participatif




Les médias papiers n'ont plus vraiment le monopole de l'information de nos jours, ils laissent progressivement la place aux plateformes internet. Au cœur de l’Océan Indien, le site Exprimanoo.com permet aux internautes d’être les seuls acteurs de l’actualité, proposant ainsi une alternative à l'information formatée des médias officiels. Un pari réussi pour le site, qui s’est aussi lancé dans une version papier.

Alors que le monde connaît une période de mutation accélérée des médias depuis l’émergence du numérique, des médias sociaux et citoyens fleurissent un peu partout sur la toile. Le 1er octobre 2008, le site Exprimanoo a vu le jour au sein de la Réunion, Madagascar, les Comores, les Seychelles, Maurice, ainsi que des départements d’outre-mer français.

Ce site d’information présente une particularité : les rédacteurs sont simplement des citoyens indépendants. Après une inscription gratuite, les internautes peuvent publier librement en français, anglais ou créole les articles de leur choix. Une initiative ambitieuse et originale qui permet aux personnes du monde entier de s’alimenter en actualités sur l’Océan Indien. A l’heure où certains pays imposent une censure chronique sur la presse locale, Exprimanoo constitue un espace d’expression libre, à la fois pour les citoyens et les journalistes de ces Etats insulaires, qui peuvent si ils le souhaitent déposer leurs papiers sous couvert d’anonymat. Chaque article publié est validé au préalable par un rédacteur en chef.

Exprimanoo constitue le premier media participatif de l'Océan Indien. L’intérêt des lecteurs et des rédacteurs ont permis la création d’une version papier dont le premier exemplaire est sorti le 1er avril 2009 sur l’île de la Réunion. L’édition mensuelle comprend une sélection des articles les plus lus par les internautes. Il s’agit du premier journal gratuit de la Réunion et du premier média participatif national papier dans ce pays de l’Océan Indien. Une avancée spectaculaire pour tous ceux qui ont des choses à dire.

Exprimanoo offre donc aux citoyens du monde une nouvelle façon indépendante de s'informer sur l’actualité de l’Océan Indien. Car ce qu’il y a de bien sur internet, c’est que la libre expression n’a pas de frontière.